ISBN 2-87340-178-8
Boris Lehman HISTOIRE DE MA VIE... racontée par mes photographies 2003 192 pages 12 x 17 cm 15.00 €
Autoportrait. Histoire de ma vie, ouvrons la boîte ; Nadine Wandel deux fois ; ombre, Couple, Regards, Position. Rue Antoine Labarre, À la recherche du lieu de ma naissance, photo de classe, école numéro 13, Schaerbeek… […]
[…] Chez Henri Storck, Boris au Havre, carnet d’adresses, Je parle espagnol ; Boris et Norstein à Moscou, Mes voyages filmés, six polaroïds, Samy dans la baignoire, Hadelin Trinon, Gérard Courant, Club Antonin Artaud, J’ai peur. B comme Boris, Boris au piano, au Mexique, dans son bain, à la gare du Midi, à la mer, mangeant des glaces à Locarno, dans le coffre d’une voiture, dans la photocopieuse, en homme de terre, au cimetière juif, croix gammée. Avis de changement d’adresse, « Ici va vivre le cinéaste Boris Lehman », Doden Worden, tourner, tourner, tourner… Boris et quelques autres, beaucoup d’autres. Un projet, un film, quelques repentirs, un épilogue. Une grosse poignée d’images. Un autoportrait ?
Critique
UN GRAND FRÈRE POUR LIO (à propos des photos de Boris Lehman)
La jeune femme avale un noyau de cerise, le vieil homme regarde par la fenêtre, la casquette et le manteau attendent l'heure de la sortie. On ne distingue pas la photo de l'image de film. C'est qu'il y a peu de cinéastes comme Boris Lehman, et encore moins de photographes comme lui.Cinéaste au cœur du cœur du cinéma, il conjugue une certaine démarche documentariste (Magnum Begynasium Bruxellense) avec les exigences de l'expérimentation conceptuelle, plastique (Babel), il s'inscrit dans une mouvance de l'art contemporain qui va de Cocteau à Warhol et Broodthaers. A l'instar des précités, c'est un touche-à-tout de génie: il est musicien, acteur, dessinateur, écrivain, photographe... Un photographe qui ne joue pas le jeu des fantasmes, des idées fixes à la mode.Rien de mortifère, de pétrifié, de tombal, dans ses photos, on a le sentiment d'être confronté à des moments de films arrêtés, qu'il y a une histoire avant, après, derrière l'image et qui est bien plus qu'une anecdote, quelque chose qui touche au mystère de l'âme. Ou encore, on se dit que ces instantanés, c'est une affaire de temps éternisé, il arrive qu'on pense aux tableaux de Vermeer.D'aucuns évoqueront Doisneau à cause de l'humour et d'une certaine atmosphère quotidienne, mais Doisneau photographie à leur insu des gens qu'il ne connaît pas, qui ne font que passer. Boris Lehman, lui, ne photographie que des individus attachés à son propre univers, chaque image est la trace d'une rencontre, elle implique une conversation, une intimité, une connivence.
Il pourrait se revendiquer de Diane Arbus: même approche brute, directe, sans voyeurisme, même refus de se tenir en retrait par rapport au sujet.Avec douceur, discrétion, il rephotographie à des mois, des années de distance, tous ceux qui font partie de la famille qu'il s'est constituée; on note son côté rapsodie, harmonie, il privilégie un type de femmes, il revient sans cesse sur «ses» thèmes: les graffitis, les nourritures, les chapeaux, les sommeils... Il ne recadre pas les clichés, ne les manipule pas, reste fidèle à la prise de vue. Il y a parfois une légère mise en situation, jamais de mise en scène théâtrale, emphatique: la pile de bobines dans le fauteuil en osier, il ne les a pas placées là, elles y étaient; idem, la pomme sur la cuisinière à gaz.Boris Lehman ou l'amour des images: «Elles me sont indispensables dans mon rapport au monde. Sans elles, je ne peux parler ni vivre. Il a une sœur, Lio, comparse de l'héroïne dans le deuxième album de la bédé Barbarella ,une gamine qui meurt si elle n'a pas toujours avec elle sa collection d'images.
Daniel Fano (Le Ligueur 28 juin 1991
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