Marianne Thys MÉMOIRES DU MONDE 100 films de la cinémathèque de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2011 256 pages 16 x 23 cm 28.00 €
Prologue de Jean-Louis Comolli
Nuit et Brouillard d’Alain Resnais, Terminus de John Schlesinger, Chantez la mer de Herman van der Horst, …À Valparaíso de Joris Ivens, Les Mammifères de Roman Polanski, Idylle sur le sable d’Henri Storck, La Noire de… d’Ousmane Sembène : quelques-uns des huit mille films conservés par la Cinémathèque de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Depuis la Deuxième Guerre mondiale, ces archives cinématographiques exceptionnelles et encore peu connues constituent une collection variée dans l’éclectisme des genres et des thèmes abordés par des réalisateurs du monde entier. […]
[…] De ces archives passionnantes, Marianne Thys a sélectionné cent films, admirés ou oubliés, émouvants ou dérangeants, innovants ou classiques, dotés pour la plupart de prix prestigieux. Mémoires du monde constitue une anthologie déclinée en plusieurs thèmes qui suivent la marche du monde, depuis l’être humain dans son habitat naturel jusqu’à l’oppression sociale et politique sous toutes ses formes. Cent regards sur l’humanité à travers l’objectif du cinéaste. Cent jalons de l’histoire du cinéma. Jean-Louis Comolli propose quant à lui un regard personnel sur cette collection, sorte de parcours subjectif qui retrace l’évolution du documentaire depuis la naissance du cinéma et la révolution amenée par le son synchrone, impliquant de nouvelles façons de filmer et des perceptions inconnues du spectateur. Publié avec la Cinémathèque de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Marianne Thys a contribué à plusieurs ouvrages sur l’histoire du cinéma belge. Elle a été chargée de la recherche et de la coordination de l’ouvrage Cinéma belge, filmographie exhaustive du cinéma belge (1895-1995) publiée en 2000 par la Cinémathèque royale de Belgique et Ludion. Dans le cadre du centenaire du cinéma, elle a écrit avec Eric de Kuyper Alfred Machin – cinéaste (Cinémathèque royale de Belgique). Marianne Thys travaille comme rédactrice pour plusieurs maisons d’édition de livres d’art.
Jean-Louis Comolli fut d’abord animateur du ciné-club d’Alger avant d’écrire dans les Cahiers du cinéma dont il deviendra le rédacteur en chef de 1965 à 1973. Chargé de cours à l’université de Paris VIII, à la Fémis, à l’école des Beaux-Arts de Grenoble, collaborateur à Jazz Magazine et à Images documentaires, il a mené en parallèle une carrière de réalisateur, tournant près de trente-cinq documentaires et six films de fiction, dont La Cécilia, L’Ombre rouge et Balles perdues.
INTRODUCTION « Collectionner des photos, c’est collectionner le monde », écrivait l’américaine Susan Sontag ; de même, Alain Resnais le suggère dans son documentaire Toute la mémoire du monde, qui voyage au cœur de la Bibliothèque nationale de France. Collectionner le monde, c’est aussi rassembler des films, des images en mouvement, des personnes, des moments, des paysages.
Les huit mille films conservés à la Cinémathèque de la Fédération Wallonie-Bruxelles nous parlent de l’état du monde. Depuis 1946 et encore aujourd’hui, ce fonds d’archives recueille essentiellement des documentaires, de divers styles, origines et thématiques, destinés au prêt scolaire et associatif. Mais les temps ont changé. Pour l’heure, la Cinémathèque numérise, (co)produit des films, livres et DVD, valorise ses collections sur la toile et en assure l’accès au monde culturel. Pour qui s’intéresse à des chapitres oubliés de l’histoire, aux coutumes tibétaines, à la conquête de l’espace, à l’architecture moderne…, elle offre plus que jamais une mémoire vive. Huit mille voyages à travers le monde. Huit mille voyages dans le temps. Tout comme les photos ou les livres, les films s’inscrivent dans la mémoire – les mémoires – du monde. Cent films ont ici été sélectionnés : ce sont autant de témoins de notre histoire. Ils forment une anthologie d’œuvres uniques – célèbres ou méconnues, interpellantes, captivantes, décapantes, classiques ou anticonformistes, c’est selon. Ce livre est en somme un guide de voyage dans l’espace-temps du cinéma documentaire et ses facettes multiples. Un guide dont la trame suit le rythme du monde et de l’humanité. Articulé en cinq parties, le parcours débute par une phase exploratoire : celle où l’homme, éternel découvreur, part en quête de nouveaux horizons, d’autres continents, de l’univers : vingt-quatre films traitent du rapport de l’homme à la nature, des voyages, des peuples et territoires offerts à sa curiosité. La deuxième partie (quinze films) s’intéresse aux traces laissées par l’homme, quand il s’adonne à l’art, bâtit des villes, fixe ses souvenirs dans des images ou des livres, en tant qu’être conscient et créatif, soucieux de sa pérennité. Comme dans les séances de cinéma d’autrefois, un entracte offre une pause détente, consacrée aux plaisirs et jeux de l’homo ludens (treize films). La quatrième partie du livre (vingt-cinq films) aborde l’être humain dans sa dimension sociale, son rapport à l’autre, à ses semblables, son acceptation ou son rejet de la différence. Aboutissement logique de cette altérité, la dernière partie (vingt-trois films) explore la sphère politique, les dogmes et idéologies portées par l’homo politicus, et surtout les traces profondes laissées dans le cinéma par le dernier conflit mondial, le plus meurtrier de l’histoire. Des textes faisant référence à l’histoire du cinéma documentaire et à différents courants qui ont marqué son développement jalonnent également ce parcours. Sélectionner cent films parmi les huit mille de la Cinémathèque fut assurément une opération ardue, car choisir, c’est renoncer. Pour personnel qu’il soit et subjectif qu’il puisse paraître, le choix des films n’est pourtant pas arbitraire. Tous ont marqué l’histoire du cinéma, les uns par leur qualité exceptionnelle, d’autres par leur regard original, novateur ou par l’exercice de réflexion auxquels ils nous convient. Certains sont tout simplement exhumés d’un oubli immérité. En outre, dix-sept films sont estampillés trois étoiles ÈÈÈ : ce sont nos coups de cœur ! Le découpage en cinq parties est une proposition d’itinéraire. Le fil conducteur a sa cohérence, même si certaines catégories sont interchangeables et si certains films peuvent être répertoriés différemment. Soyez donc curieux : il vous est possible de remonter le cours du livre ou d’y fureter par les chemins de traverse. Pour vous y aider, à la fin de chaque synopsis, un lien thématique ou formel renvoie vers des films présentés dans d’autres sections. Précisons enfin que la fiche technique est limitée aux données principales et que le titre du film, toujours affiché dans sa version originale, est complété par la traduction française. Ce livre anthologie est le fruit d’un travail de longue haleine, mené avec rigueur par Marianne Thys, dans le droit fil de sa longue collaboration à la Cinémathèque royale de Belgique (Cinematek) et de l’impressionnant dictionnaire du cinéma belge qu’elle y a orchestré. En ouverture, le présent ouvrage bénéficie d’un prologue d’une réelle densité : Jean-Louis Comolli, en « regardeur » et analyste de l’histoire du cinéma documentaire, nous communique sa lecture transversale et incisive sur la collection. Bien plus encore, il nous livre une magistrale leçon de cinéma.
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